Colloque « Mémoires et politiques de l’Exil »

Premier événement commun de l’EHESS, la New School Parsons Paris, et la New School for Social Research (NSSR), le colloque « Mémoires et politiques de l’Exil » s’est déroulé à Paris les 6 et 7 octobre au Centre George C. Marshall et au Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme (MAHJ).

Au plus fort de la Seconde Guerre mondiale, des dizaines de chercheurs ont fui l'occupation nazie en France pour New York où ils ont trouvé refuge à l'École libre des Hautes Études (ELHE), installée à la NSSR, fondée comme un refuge académique pour les universitaires européens exilés. 

Consacré à l’histoire des migrations intellectuelles et artistiques pendant la Seconde Guerre mondiale ainsi qu’au rôle que les sciences sociales et le design peuvent jouer dans la crise des réfugiés aujourd’hui, le colloque a réuni de nombreux participants français et américains et a mis en évidence les liens historiques entre l’EHESS et la New School Parsons Paris. Il a aussi initié une collaboration entre les deux institutions liées par l’histoire et désireuses de poursuivre à nouveaux frais ce parcours commun.

Le colloque a été ouvert par Pierre Cyrille Hautcœur, président de l’EHESS, Susan Taylor Leduc, doyenne de la New School Parsons Paris et Willam Milberg , doyen de la New School for Social Research à New York.

Les premières interventions ont rappelé le rôle de la New School for Social Research dans l’accueil des intellectuels français fondateurs de l’Ecole Libre des Hautes Etudes dans les années 1940, celui de la Fondation Rothschild, ainsi que le combat de son directeur Alvin Johnson pour garantir la flexibilité nécessaire à l’accueil des réfugiés intellectuels en imposant notamment le rejet des diplômes et du statut d’université. Les parcours d’exil d’intellectuels français comme Claude Levi Strauss ou Roger Caillois ont été retracés.

Les intervenants ont ensuite évoqué la situation des réfugiés aujourd’hui. T. Alexander Aleinikoff (Columbia Law University) a par exemple souligné les contradictions sur lesquelles le régime international contemporain des réfugiés était bâti et le « second exil » qu’elles créaient. Liora Israël (EHESS) a décrit le programme réfugié de l’EHESS et a insisté, dans le sillage du rapport qu’elle a récemment rendu au Secrétaire d’État chargé de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, des effets sur la communauté universitaire française de la « crise des migrants ».

Les derniers intervenants de la première journée se sont interrogés sur la manière dont le design peut être mobilisé en faveur des réfugiés. Différents projets de design et d’architecture ont été discutés. Dagan Cohen a présenté les conclusions d’un projet soutenu par la Fondation IKEA et le Haut-Commissariat aux Réfugiés de l’ONU.

La matinée du 7 octobre a repris la question sous un autre angle, s’intéressant aux expériences de l’exil et à leur expression artistique. Après que Fanny Schulmann, commissaire d’une exposition consacrée à Arnold Schönberg au MAHJ, ait évoqué son parcours d’exil, Esteban Buch (EHESS) a analysé le rapport de Schönberg exilé à la « loi » (mosaïque ou harmonique). La question de la créativité en exil a été ensuite posée dans toute sa généralité par Gisèle Sapiro (EHESS). Michel Agier (EHESS), enfin, s’est appuyé sur l’exemple du « camp-bidonville » de Calais pour ouvrir une réflexion sur les conditions de l’exil et de l’hospitalité aujourd’hui.

Dans l’après-midi, deux ateliers réunissant intervenants et étudiants ont permis d’approfondir certains thèmes traités lors des interventions. Les regards croisés d’historiens, de designers, d’architectes, de sociologues et d’anthropologues ont nourri des échanges très denses et ouvert des perspectives de solutions pour répondre à la crise actuelle des réfugiés, illustrant de façon concrète la fécondité des coopérations entre design et science sociales.

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