Première rencontre du cycle « Sciences sociales et cinéma » avec Fanny Cosandey

Lundi 19 octobre a été inauguré, au MK2 Bibliothèque, le nouveau cycle « Sciences sociales et cinéma » conçu en partenariat avec MK2. A travers ce cycle de projection-débats, l’EHESS souhaite partager avec de nouveaux publics les questionnements propres aux sciences sociales grâce à une confrontation avec les formes et les moyens du cinéma. Dans le contexte de l'élection présidentielle, la saison 2016 - 2017 est consacrée aux « Figures du pouvoir » et organisée autour de dix rencontres mensuelles (programme en cours de finalisation).
A l'issue de la projection du film Les adieux à la reine de Benoît Jacquot, l'historienne Fanny Cosandey (CRH - EHESS) a animé une riche discussion autour de la question de l’incarnation du pouvoir royal dans l'Ancien Régime, s'interrogeant notamment avec le public sur les caractéristiques de la figure royale représentées dans le film.
Versailles, société de l'apparence
Ce long-métrage de Benoît Jacquot se déroule à Versailles dans les quelques jours qui suivent la prise de la Bastille. Il retrace le fil des événements tels qu’ils ont été vécus et compris par la jeune lectrice de Marie-Antoinette. Pendant la discussion, Fanny Cosandey a souligné l’importance fondamentale de l’apparence dans la société de cour versaillaise. La parure et le vêtement y révèlent le sentiment de puissance des individus et les relations de pouvoir effectives dans lesquelles ils sont engagés. Le film s’attache fortement à cette thématique. Les habits du roi et de la reine, les robes de la favorite de la reine ou de sa lectrice accaparent l’attention du réalisateur et du spectateur, faisant du vêtement un enjeu explicite, voire un véritable acteur, du film : le choix d’un chapeau (avec ou sans plume) pour le roi, le « cahier des atours » de la reine, la couleur de la robe de sa favorite (un vert étincelant), le commerce illicite de ses habits, … sont autant de points de fixation dramatique. Les adieux à la reine pose aussi la question des formes que peut prendre l’intimité dans la société de cour, insistant sur les relations des membres de la famille royale avec les « subalternes », mise en scène dans le film par la relation intense et ambiguë entre la reine et sa lectrice.
Marie-Antoinette : une « tête à couper »
Lors des échanges avec la salle, Fanny Cosandey a remarqué que la question des rangs, essentielle dans la société de cour, était négligée dans le film, qui, dans sa représentation de la famille royale, se concentre sur le couple du roi et de la reine, mettant au second plan ou ne représentant pas du tout les nombreux autres membres de la famille royale. Fanny Cosandey a enfin relevé les particularités de la figure de Marie-Antoinette qui, malgré la sympathie ou l’adoration qu’elle suscite - comme toutes les reines -, est première dans la liste des « têtes à couper » par les révolutionnaires, accusée d’avoir des mœurs trop légères (ou trop libres pour une femme, qui plus est « publique ») et d’espionner pour le compte de l’Autriche.
La prochaine séance aura lieu le 17 octobre autour du film Tsar de Pavel Lungin. La séance sera suivie d'une discussion avec Wladimir Berelowitch (CERCEC - EHESS).