Marie-Paule Hille
Maîtresse de conférences de l'EHESS, Directrice adjointe de Chine, Corée, Japon - CCJ
Marie-Paule Hille est historienne et anthropologue. Elle étudie sous ses aspects politiques, religieux et économiques la société musulmane de langue chinoise implantée dans le nord-ouest de la Chine (Gansu-Ningxia-Qinghai) du milieu du XIXe siècle à nos jours en combinant une approche historique et anthropologique.
Quel rôle les musulmans ont joué dans la vie politique régionale et nationale en Chine ? Quelles transformations religieuses ont eu lieu au sein de cette société musulmane ? Quels modèles économiques originaux ont pu émerger de ces milieux politico-religieux ? Ces questions historiques et anthropologiques, nécessaires pour notre compréhension du monde chinois et de l’islam mondial, sont au cœur de son programme de recherche et d’enseignement.
Histoire et anthropologie politique
Quel a été le rôle des musulmans dans la militarisation croissante de la société du nord-ouest après les grandes révoltes musulmanes, notamment celles du milieu du XIXe siècle ? Comment les loyautés se sont construites puis défaites dans des moments révolutionnaires particulièrement violents ? Quelles élites religieuses ont été intégrées au programme de réformes dès la prise du pouvoir par le Parti communiste en 1949 avant d’en être évincées dans des moments politiques plus radicaux ?
À partir d’enquêtes de terrain et d’études contextualisées et situées, Marie-Paule Hille questionne en premier lieu les processus politiques qui ont conduit une minorité religieuse vivant dans des régions éloignées du pouvoir central à participer de façon de plus en plus active et visible à la vie politique. L’ethnographie du politique proposée vise à tenir ensemble des données sur le savoir-faire des gouvernants et sur le savoir-faire des gouvernés dans les relations de pouvoir.
Histoire et anthropologie religieuse
Comment le soufisme s’est-il développé en Chine ? Dans quelle mesure la société chinoise, de par sa structure lignagère et de par sa haute culture, a constitué un terreau fertile à son implantation ? En quoi les milieux environnants, bouddhistes et taoïstes, ont favorisé les expressions d’une mystique musulmane dans le nord-ouest de la Chine ?
Marie-Paule Hille s’intéresse à l’histoire et aux développements récents du soufisme dans le nord-ouest de la Chine. Elle propose de montrer comment les confréries soufies, constituées en îlots de pouvoir religieux, politique et économique, ont été perçues par les différents pouvoirs politiques, que ce soit les généraux de l’empire chargés de réprimer leurs révoltes ou les cadres du parti chargés de démanteler leur structure politico-religieuse.
Histoire et anthropologie économique
Le Xidaotang, courant minoritaire de l’islam chinois apparu à la fin du XIXe siècle dans le sud du Gansu, a connu un vif succès économique pendant la première moitié du XXe siècle et constitue encore aujourd’hui un modèle de développement économique original. Sur quoi repose l’originalité de ce modèle économique ?
Pour mieux comprendre les succès commerciaux du Xidaotang durant la première moitié du vingtième siècle, Marie-Paule Hille entend ethnographier les notions de bien commun, de sacrifice et de qualification éthique qui ont été au centre de la vie collective du daotang, une organisation socio-économique complexe qui s’apparente à un phalanstère. Elle se propose de pousser plus loin l’enquête qu’elle a menée avec Bianca Horlemann et Paul Nietupski dans Muslims in Amdo Tibetan Society (Lexington Books, 2015) en étudiant les réseaux politiques, sociaux et religieux qui soutenaient ce système économique et qui s’étendaient des marches tibétaines aux zones côtières de la Chine.