Portraits de Francesca Balsamo et Mohamed Belhadj, deux lauréats des contrats doctoraux 2020 de l'EHESS

Le 22 septembre 2020, l'École doctorale de l'EHESS attribuait trente-quatre contrats doctoraux. Découvrez deux exemples de sujets de thèse et de méthodologie de recherche en sciences sociales à travers les portraits de Francesca Balsamo et Mohamed Belhadj.
Retrouvez également les portraits de Guilhem Corot et Bérengère Pinaud.
Francesca Balsamo – Mention Arts et langages
« (Ré)-apparitions de la poussière dans l’art contemporain »
Pendant le master en histoire de l’art à l’université de Rome La Sapienza, mes études se sont concentrées sur la critique de l’art et en particulier sur celle de la tradition française du XXe siècle, qui, à partir du rapport avec l’histoire, ouvre la discipline de l’art à plusieurs champs, comme celui de la sémiotique et de la psychanalyse. Mon projet de doctorat interrogera le rôle de la poussière dans l’art contemporain – prenant en considération, par exemple, les travaux de Duchamp, Giacometti, Rauschenberg et Parmiggiani – à partir du seuil de signification de l’objet artistique, seuil qui se déplace vers les limites et les frontières extérieures de l’œuvre. Il s’agit d’interroger la présence de la poussière dans sa pluralité de sens, comme mélange pluri-matériel, signe et déchet du signe. La poussière se pose aussi comme le revenant et le refoulé par excellence, ouvrant à l’irruption d’une dimension traumatique de l’histoire. Cette dernière acception permettra une réflexion sur le régime d’historicité que cet élément matiériste mette en œuvre. Il ne s’agit pas d’un régime linéaire ou évolutif, mais d’une discontinuité entre une présence initiale de la poussière dans l’art moderne et sa réapparition dans l’art contemporain avec Duchamp.
L’affinité à la critique française a stimulé dans mes études l’exercice d’ouverture à des points de vue différents, et c’est pourquoi que je considère la structure pluridisciplinaire de l’EHESS précieuse pour développer une recherche qui voudrait s’ouvrir à plusieurs directions.
Mohamed Belhadj – Mention Terrains, textes, interdisciplinarité
« Hospitalité et cosmopolitisme : une ethnographie du phénomène “Muslim Friendly” dans le Japon contemporain »
Après une double licence de japonais et de commerce international à l’Inalco, j’ai intégré la mention Études asiatiques de l’EHESS pour mon master et, dans un souci de continuité, j’ai opté pour la nouvelle formation doctorale Terrains, textes, interdisciplinarité (2TI). Ma motivation première était de poursuivre cette démarche pluridisciplinaire engagée au cours de mon parcours universitaire en me formant à l’anthropologie, à la sociologie et aux sciences sociales du religieux afin de mieux saisir plusieurs phénomènes en lien avec l’islam observés au cours de précédents séjours linguistiques au Japon.
Dans la poursuite des résultats du mémoire de master, la recherche doctorale que je vais mener, en co-direction avec Emma Aubin-Boltanski (Césor) et Marie-Paule Hille (CECMC), portera sur les communautés musulmanes installées au Japon et sur plusieurs entreprises et institutions japonaises. Ces dernières ont la particularité d’être chargées de confectionner des produits ou de proposer des activités tournées vers les besoins du musulman : entre autres des tapis de prière, de l’alimentation halal et d’organiser le pèlerinage à La Mecque. Ces groupes seront étudiés par le prisme des nouvelles politiques d’hospitalité appelées « Muslim Friendly » mises en place par le gouvernement nippon après 2013 en faveur des touristes et étudiants de confession musulmane. Je m’attacherai avant tout à décrire le rôle déterminant de ces politiques d’accueil dans les transformations observées dans certaines municipalités japonaises et soulignerai également les manques importants avant leur apparition (principalement dans les domaines de l’alimentation et du textile) pour les diasporas de cette confession installées depuis plus de trente ans sur le territoire national.