Soutenance de thèse

D'une œuvre à l'autre : les modalités de la circulation des idées entre auteurs. Histoire sociale des idées "spinozistes" chez Pierre Bourdieu

Résumé

Parmi tous les auteurs avec lesquels la pensée de Bourdieu a été mise en dialogue, Spinoza occupe sans doute une place à part dans la littérature académique. En effet, depuis le début des années 1970, des dizaines de commentateurs de nombreux pays, tant philosophes que chercheurs en sciences sociales, évoquent avec un sentiment d’évidence le « spinozisme » de Bourdieu, qui tiendrait notamment à une approche «déterministe» qui leur serait commune. Or cette perspective, qui établit des rapports conceptuels entre deux pensées, sert souvent à accréditer l’idée selon laquelle Spinoza constituerait une « source » effective dont Bourdieu se serait servi sans toujours la reconnaître à sa juste valeur. À rebours de telles « influences » décelées au seul moyen d’une herméneutique des textes, notre étude propose de considérer la circulation des idées entre auteurs en mettant en œuvre les ressources qu’offre la sociologie, afin de comprendre les modalités précises de la réception et de la mobilisation des idées de Spinoza par Bourdieu. Celles-ci n’engagent certainement pas une simple « lecture » de l’œuvre mais ne peuvent se comprendre qu’à la lumière des très nombreux processus par lesquels le sociologue s’est trouvé confronté à cette pensée métaphysique et l’a retraduite de manière originale dans son travail sociologique. En analysant de manière détaillée les phases importantes de la trajectoire de Bourdieu lors desquelles il a été exposé et s’est positionné vis-à-vis de l’œuvre du philosophe hollandais depuis sa première scolarité, ainsi que les évolutions majeures de la place occupée par Spinoza dans les champs philosophique et intellectuel français qui lui ont permis d’accéder au statut de philosophe canonique que l’on lui connaît aujourd’hui, il devient possible de contrer ces « généalogies fictives », souvent imposées aux chercheurs malgré leurs protestations, afin que ces affiliations aussi fréquentes qu’imprécises (« spinoziste », « marxiste », « durkheimien », etc.) puissent être remplacées par un dispositif empiriquement étayé, à même de rendre compte des processus précis par lesquels s’engendrent des rapports toujours singuliers entre deux auteurs.

Jury

  • M. Frédéric Lordon (Directeur de thèse), CNRS
  • M. Matthieu Béra, Université de Bordeaux
  • M. Johan Heilbron, CNRS
  • Mme Isabelle Kalinowski, CNRS
  • M. Pierre-François Moreau, ENS Lyon
  • Mme Gisèle Sapiro, EHESS

Informations pratiques

Date(s)
  • Vendredi 10 décembre 2021 - 14:00
Lieu(x)
  • Visioconférence Afin d'affecter le moins possible la qualité de la visioconférence nous sommes contraints de limiter l'accès au public. Les personnes souhaitant assister à la soutenance devront se rapprocher du candidat.